Ce que vous avez le droit de garder...
Si vous avez des difficultés à honorer vos dettes, une partie de vos rémunérations peut être cédée directement à vos créanciers, par le biais d’une saisie sur salaire décidée par la justice. Pour éviter le dénuement total du salarié dans ce cas, le législateur impose des limites. Mais jusqu’où nous protégent-elles?
Pour diverses raisons, le salarié peut se retrouver dans l’impossibilité d’honorer ses créances. Dès lors, ses prêteurs ont la possibilité de décider de saisir entre les mains de son employeur tout ou partie de son salaire afin d’obtenir le remboursement de leurs créances. De ce fait, pour s’assurer que la personne endettée garde un minimum nécessaire, la législation marocaine a établi en détails les parties saisissables ou cessibles et celles insaisissables ou incessibles du salaire. Ces règles censées protéger le salarié sont fixées par les dispositions des articles 488 et 489 du code de la procédure civile. De même, le code du travail s’est prononcé sur la question dans son article 387. «Il s’en sort que la somme cessible ou saisissable du salaire, qui correspond à la somme qui va être retirée du salaire, ou au montant maximum qui peut être retiré, ne s’applique pas à tous les gains du salarié», explique Ibrahim Douhmad, conseiller juridique au sein de CMS Bureau Francis Lefebvre à Casablanca. Autrement dit, ne sont pas pris en compte les suppléments à cette rémunération, à savoir: les indemnités et rentes déclarées insaisissables par la loi, les sommes allouées au titre de remboursement de frais ou de dépenses subies par le salarié en raison de son travail, les primes à la naissance et l’indemnité de logement. La saisie sur salaire ne s’étend pas non plus aux allocations familiales, à la pension alimentaire et certaines indemnités prévues par le contrat de travail, la convention collective de travail, le règlement intérieur ou par l’usage telles que les primes pour certaines occasions comme les fêtes religieuses. Par ailleurs, il a été clairement établi que quels que soient le montant et la nature de la dette, les rémunérations dues à tout salarié, sont saisissables et cessibles à condition que le montant retenu ne dépasse pas une portion du salaire annuel, bien déterminée par l’article 387 du code du travail. Il s’appuit sur le salaire minimum légal. Cependant, ces mesures censées protéger l’employé restent controversées
«Cette méthode de calcul n’est pas exempte de problèmes…. Il doit être tenu compte dans le calcul de cette portion non seulement des appointements et salaires proprement dits, mais également de tous accessoires», regrette Ibrahim Douhmad. C’est donc sur la rémunération réelle que la retenue est calculée, tout en se conformant aux différents taux fixés par l’article 387 du code du travail. Et les rémunérations dues à tout salarié par un ou plusieurs employeurs sont annuellement saisissables jusqu’au recouvrement total de la somme. De plus, la procédure de saisie-arrêt sur salaire est souvent longue. Cette lenteur de procédure aurait pu être bénéfique au salarié qui gagne du temps. Mais ce n’est pas le cas sachant que son salaire sera immobilisé dès que la saisie a été pratiquée en vertu d’un titre exécutoire ou d’une ordonnance rendue à cet effet. «Pendant tout ce temps, des prélèvements réguliers sont effectués entre les mains des employeurs au profit d’un créancier. Fut –il dans la limite de la dette du salarié?», se demande le conseiller juridique. En effet, le montant des saisies peut même dépasser les sommes dues. Le bilan ne se fera que plus tard.
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Des cas pratiques de saisie arrêt :
Tribunal de première instance – Rabat Ordonnance n° 898 du 06 juillet 1987 Procédure civile : Saisie-arrêt – Titre exécutoire nécessaire (non) – Saisie portant sur un compte courant débiteur – Suspension des effets de la saisie jusqu’à clôture du compte et détermination du solde créditeur (oui).
Une saisie-arrêt peut être ordonnée sur le fondement d’un jugement même non exécutoire. L’une des conditions essentielles de la saisie-arrêt est l’existence d’une dette du tiers saisie à l’égard du saisi. les effets d’une saisie-arrêt portant sur un compte courant débiteur doivent donc être suspendus, et ce compte courant doit continuer à fonctionner, les effets de la saisie-arrêt étant suspendus jusqu’à la clôture du compte et détermination du solde créditeur de ce compte. (In Revue Marocaine de Droit, n°14, Septembre – Octobre 1987)
Tribunal de première instance – Casablanca Ordonnance n° 5823 du 14 novembre 1986 Procédure civile : Saisie-arrêt – Saisie conservatoire : Mesure de protection contre le risque d’insolvabilité d’un débiteur – Etablissement bancaire – Solvabilité présumée – Saisie abusive (oui). 001093 :
Le but d’une saisie conservatoire et d’une saisie-arrêt est de protéger un créancier contre le risque éventuel d’insolvabilité du débiteur et d’empêcher ce dernier de disposer de ses biens d’une manière préjudiciable aux intérêts de ses créanciers. Aucun risque éventuel ne menace un créancier lorsque le saisi est un établissement bancaire ; c’est la solvabilité et non l’insolvabilité de celui-ci qui est présumée. Une saisie-arrêt et une saisie conservatoire pratiquées à l’encontre d’une banque sont en conséquence des mesures abusives. (In Revue Marocaine de Droit, n°11, Janvier – Février – Mars 1987)